L’article 1792 du Code civil dispose que « tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination. »
En d’autres termes, un constructeur verra sa responsabilité engagée sur une période de 10 ans à compter de la récpetion de l’ouvrage pour tout dommage compromettant sa solidité ou le rendant impropre à sa destination. Mais pour que cette garantie décennale soit engagée, il faudra prouver l’existence d’un ouvrage. Or, cette notion n’est pas définie dans les textes de loi français et a été spécifiée au fil du temps par le juge français.
Qu’est-ce qu’un ouvrage au sens juridique du terme ?
Dans la langue française, un ouvrage est défini comme étant le fruit d’un travail. Mais en droit, certains critères ont dû être mis en avant pour qualifier cette notion.
Le premier critère : Une immobilisation
Pour qu’un travail soit qualifié d’ouvrage, il faut dans un premier temps qu’il soit immobilisé, à savoir rattaché au sol ou à un ouvrage préexistant.
Une piscine creusée sera donc un ouvrage, tout comme une terrasse au premier étage d’une maison et reposant sur une structure en bois fixée dans le mur. A contrario, une maison mobile simplement posée sans travaux ni fondations ne constituera pas un ouvrage.
Le second critère : Un travail de construction
Dès lors qu’une construction est réalisée sur existants, il faudra prendre en considération d’autres facteurs pour déterminer s’il s’agit d’un ouvrage ou non. Trois éléments doivent être vérifiés de manière cumulative ou alternative selon l’espèce :
La nature des travaux
Pour que des travaux soient considérés comme un ouvrage, il faut démontrer que leur objet est de nature à modifier conséquemment la construction pour lui apporter une réelle plus-value.
Par exemple, l’apport d’éléments nouveaux sur une toiture ou la peinture d’un bâtiment pour assurer son étanchéité pourront être considérés comme des ouvrages. A l’inverse, une simple peinture d’un bâtiment pour des raisons esthétiques ne pourra pas être considérée comme un ouvrage.
L’ampleur des travaux
Ce critère a pour objectif de distinguer l’ouvrage des travaux de rénovation plus légers.
Seront alors considérés comme un ouvrage des travaux de rénovation d’un immeuble lors desquels sont réalisés un ravalement de façade, le remplacement de certaines parties de l’immeuble ect. En revanche l’installation d’une pompe à chaleur installée sur un socle en béton ne pourra pas être considérée comme un ouvrage, malgré le raccordement hydraulique effectué.
Le montant des travaux
Enfin, le montant des travaux peut jouer un rôle dans la qualification d’un ouvrage.
Ont alors été considérés comme tels des travaux de rénovation dont le coût total était supérieur à 6500 euros, au contraire de travaux dont la somme était de 4483,08 francs.
Dans tous les cas, la nature des travaux en question seront soumis à la discrétion du juge qui sera le seul décideur de la qualification à employer.
Et concernant les désordres affectant l’ouvrage ?
L’article 1792 du Code civil entraine une garantie décennale du constructeur. Pendant 10 ans à compter de la réception de l’ouvrage, le constructeur sera donc responsable pour tout dommage qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui le rendent impropre à sa destination.
L’appréciation de ces deux points relève également du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond, même si ces derniers ont tendance à apprécier souplement ces conditions.
Le dommage qui compromet la solidité de l’ouvrage
Un constructeur pourra voir sa responsabilité engagée pour avoir effectué des travaux compromettant la solidité de l’ouvrage. Pour définir si la solidité de l’ouvrage est affectée, il faut rechercher si un élément structurel a été touché.
Il peut s’agir, par exemple, de l’apparition de fissures suite à des travaux qui affaiblissent la structure d’un immeuble et menacent qu’un mur s’effondre. Si ces fissures n’ont qu’un impact esthétique mais ne menacent en rien l’ouvrage, l’article 1792 du Code civil ne pourra pas s’appliquer.
Le critère de sécurité de l’ouvrage et de ses occupants est également retenu par la jurisprudence pour retenir la notion décennale du désordre litigieux.
Le dommage qui rend l’ouvrage impropre à sa destination
La responsabilité du maître d’ouvrage pourra aussi être engagée en se basant sur l’impropriété à la destination de l’ouvrage. Si l’ouvrage ne peut servir à son objectif initial, l’article 1792 du Code civil pourra être appliqué.
Ce sera notamment le cas de l’installation d’un système de chauffage solaire qui ne permet pas le service prévu initialement, notamment les économiques de chauffage et le réchauffage d’une piscine.
A contrario, la Cour de cassation a rejeté cette condition dans le cas où un système de pompe à chaleur ne fonctionnait pas correctement. Les juges avaient alors pointé du doigt un inconfort dû aux variations de température en découlant, mais qui n’entrainait pas une impossibilité de travailler dans l’immeuble.
L’extension à l’affectation de la solidité d’un élément d’équipement indissociable de l’ouvrage
L’article 1792-2 alinéa 2 du Code civil a étendu la garantie décennale aux éléments scellés à l’ouvrage. Dans un tel cas, leur retrait causera nécessairement des dommages à l’ouvrage. Le juge devra donc motiver sa décision constatant la dissociabilité ou l’indissociabilité d’un équipement.
Un chauffage au sol sera par exemple considéré comme tel, en revanche un radiateur simplement apposé sur un mur n’entrera pas dans le champ de compétence de la garantie décennale.
Les conséquences
Dans les cas exposés ci-dessus, vous aurez donc 10 ans pour engager la responsabilité du constructeur pour les dommages affectant votre bien immobilier.
Pour toute demande sur le sujet, n’hésitez pas à contacter notre équipe d’avocats du Cabinet Cambronne Avocats.